Une offre d’achat pour Anticosti

Au mois de mars 1926, après des rencontres à Paris avec un représentant puis avec le directeur, Maynard et Whitehead, de la compagnie Wayagamack, une papetière établie au Canada, ce dernier fait par lettre une offre d’achat pour l’acquisition de l’île d’Anticosti le 8 du mois.

Rencontre le 16 avec Martin-Zédé et Menier. Gaston, âgé de 72 ans, se porte bien après avoir subi une récente opération chirurgicale.

Martin-Zédé, conscient que la vente de l’île est imminente, tente de s’entendre avec son patron afin d’obtenir une compensation financière substantielle pour les nombreuses années (31) consacrées à administrer et à développer Anticosti.

En cas de vente, il demande « la somme ou l’équivalent » de 300 000$ pour « me rémunérer de mon travail et de mes soucis sans prendre le temps perdu », écrit-il. (Martin-Zédé, Cahiers, carnets, agendas, 25A -1926, 30 mars, www.comettant.com)

Après un « débat mouvementé », un accord verbal survient le 5 juin : Gaston Menier et ses fils, Georges et Jacques, donnent leur assentiment à l’entente le 10.

Finalement, ce n’est que quelques jours plus tard, le 16 juin, que Martin-Zédé décide de quitter la France pour gagner Anticosti.

Le Fleurus remplace le Savoy

La construction du Fleurus est enfin terminée en avril.

Ce navire voulu en 1922, construit à partir de 1924 et livré en 1926 remplace le Savoy. Le capitaine Caron est précédemment venu du Canada en France le 16 mars pour conduire le bateau à bon port un mois plus tard.

Par la suite, le Savoy sera enfin vendu; Menier retire 10 000$ de la transaction.

À Québec, Anticosti est vendue à la Wayagamack le 29 juillet 1926

Pendant ce temps, au Canada – où Martin-Zédé arrive à Québec le 25 juin – le directeur de la Wayagamack, Whitehead, est en visite à Anticosti jusqu’au 26 en compagnie d’explorateurs mandatés pour survoler l’île et lui rendre compte de son potentiel forestier.

Ce n’est que le 2 juillet que le régisseur arrive à Anticosti, cette fois à bord du Fleurus qui fait depuis peu la navette Québec-Anticosti en remplacement du Savoy.

Il constate qu’ « un avion dans la baie survole l’île tous les jours. »

Réunions, inspections et le budget occupent son temps jusqu’à ce qu’il retourne dans la capitale accueillir Gaston Menier, lequel y arrivera le 24 juillet. Martin-Zédé l’y a rejoint et écrit ce même jour dans son journal : « La vente de l’île dont l’option a été donnée è M.Whitehead président de la Wayagamack Pulp and Paper Co. est bien près d’être réalisée. »

C’est le 29 juillet que Menier signe la vente pour un montant de six millions de dollars à être versé en deux versements égaux le 2 août et le 1er septembre. Le régisseur tire deux avantages immédiats de cette importante transaction.

• Il est nommé « directeur général de l’Anticosti Corporation » pour l’île, sous l’autorité de M. Faure de la Belgo Canadian Co

• Menier lui versera 75 000$ le 12 août et 225 000$ le 30. C’est le 300 000$ de l’entente convenue le 10 juin dernier. « Enfin, Anticosti m’aura rapporté quelques chose après 31 ans de travail », souligne-t-il le 30 juillet; mais il ajoute avec amertume le 30 août : « si je reste Français, le gouvernement m’en prend une grande partie ».

Revenu à Anticosti le 1er août, trois jours après la vente de l’île à Québec, Martin-Zédé communique la nouvelle aux insulaires : « J’annonce à tous la vente de l’île et la formation de l’Anticosti Corporation.

Cette nouvelle semble être généralement acceptée avec contentement. C’est l’avenir de l’île assuré », écrit-il. Il réunit les employés le lendemain pour leur annoncer la création de la nouvelle société..

Arrivée de Gaston Menier, de sa famille et des Donohue à Anticosti le 12 août

C’est le 12 août que Gaston Menier et la famille de son fils Georges arrivent à Anticosti è bord du nouveau navire, le Fleurus. Charles Donohue et sa dame les accompagnent.

Tous s’installent à la villa dont Menier a conservé la propriété. Pendant les quinze jours où il demeure sur l’île, Gaston travaille au règlement des indemnités à verser à l’ancien personnel.

Il prend un peu de repos (deux jours) avec les siens à la rivière Bec-scie et séjourne à la villa pour le reste du temps. Le 27 août, il quitte Anticosti avec sa famille. Mais l’évènement ne termine pas tout à fait l’histoire des Menier à Anticosti. En effet, Thyra Seillière, la veuve d’Henri Menier, qui s’estime flouée dans l’affaire de la vente de l’île, ressurgit dans le décor et intente un procès dont la durée s’étendra sur trois ans.