Introduction des cerfs | |||||||||||||||||||||||||||
M. Joseph Bard est originaire de Saint-Cyrille de L'Islet et eut l'occasion, au début des années 1940, de travailler avec un homme nommé Gaudias Bélanger de Saint-Cyrille qui lui raconta les faits suivants : M. Gaudias Bélanger a travaillé toute sa vie comme ouvrier forestier.
Célibataire, il causait peu et aimait vivre la fin de semaine dans une cabane qu'il s'était construite en forêt.
D'après M. Bard, Gaudias était un homme sérieux qui n'avait pas la réputation d'être un conteur de blagues.
Il causait très rarement de son passé et il fallait des circonstances particulières pour qu'il fasse connaître une page de sa vie.
C'est au cours d'une circonstance de ce genre qu’il raconta à M. Bard sa participation à la capture des cerfs (chevreuils) vendus à Menier pour son île.
Voici donc en résumé ce que Gaudias Bélanger a raconté :
Il avait participé vers l'âge de 13 à 15 ans, avec un groupe d'hommes, à la capture de cervidés dans des cédrières à flanc de montagne ou dans d'anciens bûchers, et cela au cours de trois hivers.
En effet, il se rappelait que les opérations de capture eurent lieu au cours de trois hivers, que la chasse en raquettes avaient lieu aux endroits mentionnés ci-dessus et dans les « ravages » des chevreuils.
Une dizaine d'hommes participaient à ce « rassemblement » et dirigeaient les bêtes par groupe de sept ou huit vers la ligne de chemin de fer.
En terrain dégagé, les chevreuils s'enfonçaient dans la neige et on en profitait pour « courir à pied et mettre le pied dessus » ; ils étaient alors attachés et déposés par groupes de deux ou trois sur des traîneaux nommés « chiennes » faits de petits bouleaux écorcés.
Il arrivait que des gars des équipes soient blessés par des coups de sabot.
Les personnes suivantes, originaires de Saint-Cyrille, ont participé à cette capture : les familles de Gaudias Bélanger et d’Omer Bélanger, Carlos (?), Gagné (?).
Les personnes suivantes, de Sainte-Perpétue, ont également participé : Augustin Fournier et Arthur Beaulieu, ingénieur forestier. Et un M. Gagné de Saint-Marcel.
Les chevreuils capturés étaient gardés et nourris dans des granges ou autres bâtiments en attendant leur transport par train vers Rimouski où ils étaient embarqués à bord du Savoy. De 20 à 30 cerfs étaient capturés chaque hiver.
Donc, s’il y eut trois introductions, le nombre total de cerfs serait situé entre 60 et 90 et non 120, en une seule introduction (1897), comme le rapporte Martin-Zédé.
Les cerfs étaient tous originaires du comté de L'Islet. Les captures ont été effectuées dans trois cantons ou municipalités : Bras d’Apic, La Fontaine (près de Sainte-Perpétue), Lefèvre.
Les cerfs étaient mis dans des cages en bois puis transportés sur des wagons tirés par des chevaux jusqu'à la plus proche station de chemin de fer.
Lorsque les cerfs avaient été capturés à Bras-d’Apic, ils étaient transportés à la station de L’Islet; capturés à La Fontaine ou à Lefèvre, ils étaient transportés à Saint-Jean-Port-Joli pour chargement sur le train.
De ces endroits, les cerfs étaient conduits à Rimouski et chargés à bord du Savoy (premier bateau à aller à Anticosti au printemps). Une prime de cinq dollars était accordée pour une femelle enceinte.
On cherchait surtout à capturer des femelles, et en gestation si possible, pour mise bas à Anticosti. Les cerfs capturés ne devaient pas être âgés de plus de trois ans et préférablement âgés de deux ans.
Les Bélanger, Carlos, Garnier, Fournier et Beaulieu étaient les meilleurs forestiers du comté et ils connaissaient très bien les endroits où vivaient les cerfs, ayant parcouru tout le comté depuis leur enfance.
Les captures ont été toutes faites dans le territoire d'exploitation forestière ou dans des régions environnantes.
Les cerfs étaient localisés au cours des travaux en forêt que faisaient ces personnes au service d'une compagnie (Power Lumber ?).
Les cerfs mangeaient souvent le foin que l'on amenait pour nourrir les chevaux utilisés dans les opérations de coupe et de charroyage.
Ce foin était souvent empilé au « coin du roule de billots » et, une fois les chevaux partis avec leur chargement, les cerfs venaient manger le reste de foin.
À l'époque, on disait que le plus beau chevreuil du Québec était du comté de L’Islet.
Au début des années 1940, le cerf était encore abondant dans ce comté et on pouvait en voir cinq ou six sur une distance de 200 pieds qui broutaient le foin tombé le long du chemin ou dans le « coin de roule de billots ».
Gaudias Bélanger était âgé de 60 ans en 1940 et mourut à l'âge de 83 ou 84 ans, vers 1970.
Le fait qu'il y ait eu trois introductions à l'île de cerfs a été mentionné dans Pimlott, Newson,
La Consolidated Bathurst (Charlie McCormick). D’après Jean Huot, il serait fort probable que trois introductions eurent lieu au lieu d'une seule.
En effet, la capture de 150 cerfs en un seul hiver est une chose très difficile à réaliser à cause de la complexité dans l'entretien et le transport de ces animaux sauvages. […]
Martin-Zédé, dans L’Île ignorée, mentionne qu'il a demandé à un M. Boulay de Cap-Saint-Ignace de prendre, vivants, une centaine de « red-deers », ainsi que des orignaux, des caribous et des castors (page 85).
À la page 138, il mentionne l'arrivée à l’île en juin 1897 de 150 daims (?) pris pendant l'hiver par le trappeur Boulay (achetés 15 $ chacun). |